Baisse du forfait social et modification du PERCo Proposition indécente
Rédigé par Nicolas Triki & Issam Banabila le . Publié dans Participation, Intéressement et Actionnariat.
Baisse du forfait social et modification du PERCo : proposition indécente
La loi Macron (article 149), est entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2016. Elle vise à orienter une partie des fonds PERCo (Plan Epargne pour la Retraite Collectif) vers le financement des PME et ETI.
Définitions
- PME (Petites et Moyennes Entreprises) : moins de 250 salariés, CA annuel ≤ à 50 millions d'€
- ETI (Entreprises de Taille Intermédiaires) : entre 250 et 4 999 salariés, CA annuel ≤ à 1,5 milliard d'€.
Le forfait social, payé par l’entreprise, passe de 20 à 16% pour les sommes issues de l'intéressement, de la participation ou d'un abondement de l'employeur et placées dans un PERCo à gestion pilotée. Pour que l’employeur bénéficie de cette remise fiscale, l’épargne des personnels doit être investie à hauteur de 7 % minimum dans des actions de PME et ETI.
>>> (Re)lire notre tribune : La loi Macron et l'épargne salariale : on ne donne qu'aux riches !
4 millions d’euros d’économie pour la Direction d’Orange
Une modification du PERCo permettrait une économie fiscale d’environ 4 millions d’euros (le PERCo d’Orange est le premier de France en volume). Pour modifier la composition du fonds et ajouter un compartiment de placement PME/ETI, le Conseil de Surveillance du fonds doit donner son accord.
Le 25 janvier 2016, Amundi, gestionnaire des fonds du PERCo d’Orange, a présenté au Conseil de Surveillance plusieurs propositions permettant de bénéficier de la baisse du forfait social.
Conseil de surveillance PERCo
Chez Orange, il est constitué à parts égales de représentants de la Direction et des Organisations Syndicales représentatives. Actuellement, le Conseil de Surveillance du Perco Orange compte 8 membres. 4 organisations syndicales y sont représentées : CFE-CGC, CFDT, FO, SUD. Toutes les décisions sont prises à la majorité des votes.
Qualité des placements proposés ?
Un choix d’investissement limité et des graphiques abstraits ne permettent d’émettre aucun avis sérieux sur l’intérêt et les risques des placements proposés par Amundi.
Rappelons que le PERCo a pour objectif prioritaire la constitution d’une épargne qui doit restituer un capital ou une rente lors du départ en retraite de son bénéficiaire. Le risque doit donc être très mesuré, pour garantir a minima que le capital est préservé. Or, les placements dans les PME/ETI sont beaucoup plus risqués que les placements actuels dans le PERCo d’Orange.
Intérêt pour le personnel ?
Pour le moment, aucun ! Pour l’employeur : 4 millions d’euros d’économies fiscales.
Pour l’État et les banques : un nouveau moyen de capter l’épargne des salariés pour la transférer sur un secteur à risque, en se dégageant de leurs responsabilités sur l’investissement dans les PME/ETI.
Pile je gagne, face tu perds
En contrepartie d’un risque accru pour les personnels, la Direction pourrait généreusement proposer un abondement supplémentaire de… 50 € pour les placements dans le PERCo !
Rappelons que lors de la négociation de l’accord d’intéressement 2015 (que la CFE-CGC n’a pas signé), la Direction a notamment justifié la baisse de l’intéressement par… le poids croissant de la fiscalité sur l’épargne salariale !
La fiscalité augmente ? Je baisse les enveloppes de rétribution variable des personnels. Elle baisse à condition de faire courir plus de risque à l’épargne des personnels ? J’empoche la baisse !
La gouvernance des fonds pose à nouveau problème
Les représentants du personnel dans le Conseil de surveillance du PERCo ont exprimé une prudente réserve, et se sont réunis sans la Direction pour étudier plus en détail les propositions faites, considérant pour le moment qu’il est prudent de différer toute mise en place. Mais qu’un seul flanche et vote une décision favorable à la Direction, et les carottes seront cuites !
C’est pour ce type de raison que la CFE-CGC demande depuis plusieurs années que tous les Conseils de surveillance de l’épargne salariale soient mis en conformité avec les directives européennes et les recommandations de l’Autorité des Marchés Financiers.
La CFE-CGC veille au grain, et mettra tout en œuvre pour qu’aucune décision contraire aux intérêts du personnel ne soit prise sur la composition du PERCo.