Le « nouveau contrat social » entravé par 11 milliards de dividendes à verser sur 3 ans

Stéphane Richard, Delphine Ernotte et Bruno Mettling ont présenté ces derniers jours le « nouveau contrat social » qui sera envoyé par courrier aux personnels du groupe en France, matérialisés par 6 chapitres : politique de l'emploi, organisation du travail, évolution du management, qualité de la vie au travail, rétribution et fonction RH.

La CFE-CGC/UNSA ne peut que saluer le retour à la prise en compte de la dimension sociale de l'entreprise, et la mise en œuvre d'une partie des recommandations qu'elle a régulièrement formulées depuis plusieurs mois, notamment sur la base des travaux de l'Observatoire du stress et des mobilités forcées, qu'elle anime avec SUD depuis 2007.

Les engagements pris devront néanmoins être sous-tendus par un projet industriel permettant de remobiliser les énergies autour d'enjeux positifs.

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La première richesse de l'entreprise, ce sont les hommes et les femmes qui la composent

Après 5 ans de décroissance massive des effectifs (30 000 emplois supprimés) France Télécom annonce un retour à une politique de recrutement. D'ici fin 2012, 10 000 personnes seront recrutées en CDI, prioritairement parmi les apprentis qui sont déjà dans le Groupe France Télécom. C'est une bonne nouvelle.

Il conviendra cependant d'aller encore plus loin, pour mettre fin à la logique de sous-traitance, en particulier dans les métiers en relation avec les clients, et notamment dans les Unités d'Intervention, qui sont souvent le premier contact physique des clients avec l'entreprise. Au-delà même d'une incarnation de la marque, de plus en plus nécessaire dans notre société « numérique » et virtuelle, la prise en charge du client par un salarié de l'entreprise dès le début de la relation permet de mieux cerner les besoins des clients, et d'assurer la qualité de service idoine, que Stéphane Richard souhaite également retrouver.

Pour que l'entreprise ne soit pas défavorisée sur le plan concurrentiel, l'État devra aussi prendre ses responsabilités, et interdire les délocalisations - notamment pour les centres d'appels - à tous les opérateurs de télécommunications desservant le territoire national. Une telle mesure permettrait en outre de retrouver des emplois, absolument nécessaires dans le contexte de crise économique, sans pour autant pénaliser la compétitivité des opérateurs français, puisqu'ils seraient tous soumis aux mêmes règles.

Mettre fin à l'hyper centralisme nécessite un retour de la confiance

Selon ce « nouveau contrat social », les responsables de terrain retrouveront des marges de manœuvre pour prendre des décisions locales, notamment en matière de recrutements, promotions, formations et congés.

L'obligation de prendre un tel engagement laisse entrevoir, rétrospectivement, le niveau de rigidité que l'on avait atteint dans l'entreprise. Il a malheureusement laissé des traces. La plupart des directions territoriales ou de divisions restent, au mieux, dans un prudent attentisme, et tardent à se saisir des souplesses qui leurs sont d'ores et déjà accordées.

Les cadres ont été mis entre le marteau et l'enclume, et la confiance a été perdue. Elle sera longue à reconquérir, avec le risque que les nouvelles orientations ne soient pas perçues comme réelles et concrètes par les personnels de l'entreprise. Et ce d'autant plus que de nombreux membres de l'ancienne Direction sont toujours en place, au plus haut niveau, représentant l'entreprise aux tables de négociations avec les représentants des personnels, altérant la crédibilité et la sérénité des débats.

La « construction d'un nouveau France Télécom » prendra du temps...

La CFE-CGC/UNSA est bien évidemment satisfaite que ses recommandations aient été entendues par Stéphane Richard. La rupture s'installe durablement, et il faut s'en féliciter. Il faut cependant rester conscient que le changement prend de longs mois pour irriguer toute l'entreprise et produire des effets sensibles sur le terrain.

... et doit s'appuyer sur un projet industriel en rupture avec la stratégie financière actuelle.

Il manque encore un véritable projet industriel, nécessaire pour mobiliser les énergies autour d'un objectif qui permette de laisser la crise sociale derrière nous, et de rendre de la sérénité aux équipes en assurant la pérennité de l'entreprise. Or, un projet industriel ne peut se déployer efficacement que s'il en a les moyens financiers.

La CFE-CGC/UNSA dénonce la politique  de distribution des dividendes - contraire à toutes les règles établies du capitalisme industriel - qui entrave la mise en place du « nouveau contrat social ». Les dividendes versés au titre de l'exercice 2009 ont été... supérieurs aux bénéfices (1,40 € de dividende par action, pour 1,13 € de résultat net par action, selon les comptes consolidés présentés début mars) ! France Télécom se trouve ainsi, et de loin, la plus généreuse des entreprises du CAC 40. En prenant l'engagement de maintenir le dividende à 1,40 € pendant 3 ans, France Télécom versera 11 milliards d'euros à ses actionnaires.

Sans avoir de certitude sur la conjoncture économique. Et au moment où l'entreprise doit s'engager, dès 2010, dans le déploiement de la fibre optique et des réseaux 4G.

Dans le même temps Google et Apple, qui ne versent aucun dividende, continueront à investir massivement.

Une fois de plus, nous demandons à l'État, principal actionnaire de l'entreprise, et premier bénéficiaire de ces dividendes, de prendre toutes ses responsabilités. Il doit laisser à la Direction de France Télécom les marges de manœuvre dont elle a besoin pour assurer la pérennité de l'entreprise, à une place honorable dans le concert européen des opérateurs de télécommunications.

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