Dérive dans la rémunération des dirigeants : courrier à Madame Mouna Seperhi, administrateur Orange
Rédigé par Hélène MARCY le . Publié dans Communiqués de Presse.
La CFE-CGC Orange et l'ADEAS écrivent ce jour à Madame Mouna Sepehri (Directrice déléguée à la Présidence du groupe Renault), administrateur d’Orange, Présidente du Comité de gouvernance et de responsabilité sociale et environnementale (CGRSE), chargée notamment de la question des rémunérations des mandataires sociaux d’Orange, concernant la prise en compte des votes de l’Assemblée Générale des actionnaires (Say on pay) pour la détermination de la rémunération des Dirigeants d’Orange.
La CFE-CGC et l’ADEAS souhaitent avoir des garanties sur la gouvernance d’Orange sur ce point, afin d’éviter toute dérive équivalente à celle qui vient de se produire concernant la rémunération du PDG de Renault, Carlos Ghosn.
Télécharger le courrier en pdf :
CFE-CGC Orange - ADEAS Lettre ouverte Mouna Sepehri rémunération des dirigeants 2 mai 2016.pdf
Madame,
Vous êtes administratrice d’Orange, « indépendante » au sens du Code AFEP-MEDEF, et Présidente du Comité de gouvernance et de responsabilité sociale et environnementale (CGRSE), chargée notamment de la question des rémunérations des mandataires sociaux d’Orange.
Vous êtes également Directrice déléguée à la présidence du groupe Renault, membre du comité exécutif de Renault et membre du directoire de l’Alliance Renault
Lors de la dernière Assemblée générale des actionnaires de Renault, le 29 avril dernier, les actionnaires ont voté en majorité contre la rémunération perçue par le PDG de Renault, Carlos Ghosn[1]. Rappelons que cette rémunération est la plus élevée du SBF 120 : 7,25 millions chez Renault… pour une présidence à mi-temps.
Depuis 2013, date de la mise en place du « Say on pay »[2] par le code AFEP MEDEF, c’est la première fois que le propriétaire d’une grande entreprise, c’est-à-dire l’Assemblée générale de ses actionnaires, dont l’État, se prononce contre la rémunération stratosphérique d’un de ses dirigeants.
Cette condamnation est intervenue alors même que les actionnaires étaient scandaleusement confrontés à un défaut d’information manifeste, ne disposant pas des autres éléments de rémunération de Carlos Ghosn en tant que PDG de Nissan (8 millions d’euros annuels[3])
Or, le Conseil d’administration de Renault est passé outre l’avis négatif de l’Assemblée générale des actionnaires, et a maintenu la rémunération du PDG.
À quoi servent donc tant la prise d’avis de l’Assemblée générale que le code de gouvernance AFEP-MEDEF qui prétend réguler les pratiques abusives ?
La résistance du Conseil d’administration de Renault à un avis négatif, même consultatif, voté par 54,12% des actionnaires révèle les dérives susceptibles d’intervenir dans l’ensemble de nos entreprises.
Un tel comportement du Conseil d’administration serait tout à fait incompatible avec les valeurs éthiques d’une entreprise comme Orange.
En tant qu’administratrice d’Orange et Présidente du Comité chargé de la rémunération de ses mandataires sociaux, pouvez-vous publiquement condamner le comportement du Conseil d’administration de Renault, et garantir les actionnaires de notre entreprise qu’une telle décision de votre part serait strictement impossible au sein du Conseil d’administration d’Orange ?
Certes, la rétribution de nos mandataires sociaux est loin d’atteindre le niveau de celle du PDG de Renault (environ 1,5 million d’euros annuels pour le PDG et 1 million d’euros pour les Directeurs délégués d’Orange)… Mais l’analyse du Document de référence de l’entreprise[4] tend à démontrer que la rémunération globale du Comité exécutif d’Orange croît régulièrement, beaucoup plus rapidement que celle des personnels de l’entreprise[5]. Et la rétribution des nouveaux Directeurs délégués n’est validée qu’a posteriori par l’AG des actionnaires. Nous souhaiterions que les rétributions des dirigeants soient validées en amont par l’Assemblée Générale.
Il importe donc à l’ensemble des actionnaires d’Orange, et plus particulièrement de ses actionnaires salariés (près de 8% des droits de vote), d’avoir des certitudes quant à l’éthique qui prévaut dans notre entreprise. Et ce plus particulièrement à la veille de l’Assemblée générale des actionnaires d’Orange, qui se tiendra le 7 juin prochain.
Nous vous remercions donc de votre prompte réponse, et dans l’attente, nous vous prions d’agréer, Madame, l’expression de notre haute considération
[1] http://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/automobile/le-patron-de-renault-sauve-sa-remuneration-malgre-le-vote-des-actionnaires-568235.html#xtor=EPR-2-[l-actu-du-jour]-20160502 -
[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Say on pay
[3] http://tempsreel.nouvelobs.com/economie/20160430.OBS9576/remuneration-de-carlos-ghosn-rejetee-nuit-debout-chez-renault.html
[4] http://bit.ly/DDR Orange 2015 - page 288 et suivantes
[5] en 2015 : + 6,25% pour l’ensemble du Comité exécutif / + 1,4 % pour les personnels, avant nomination des deux nouveaux Directeurs délégués qui deviennent mandataires sociaux à compter du 1er janvier 2016
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