Rapport annuel des médecins du travail, triste constat
Rédigé par Stéphanie CRESPIN le . Publié dans INNOV.
Déclaration de la délégation CFE-CGC Orange au CSEE SSCT TGI/Innovation, séance du 27 avril 2023
La délégation CFE-CGC Orange au CSEE SSCT TGI/Innovation, séance du 27 avril 2023 remercie le médecin rapporteur, le Dr Pettit-Moussally pour la synthèse des RAA des différents médecins du travail du périmètre Innovation, ainsi que les médecins du travail des périmètres Innovation à OG, 2 RAA Dr Lévy Amon et Dr Pettit-Moussally , Atalante Dr Mautin , Meylan Dr Montmayeur, Blagnac Dr Mouyen, Caen Dr Vallaeys, Montigny Dr Husson, Montpellier Dr Langeois, pour la richesse de leurs RAA, et pour la quantité impressionnante de leurs activités.
Ces activités couvrent 1875 visites périodiques et non-périodiques ou examens médicaux cliniques par les médecins et 384 par les infirmiers, soit un total de 2259 examens médicaux cliniques, des actions terrains, des études de postes, des réunions IRP, des sollicitations de l’employeur, l’accueil en soins d’urgence, …etc.
Nous remercions les médecins du travail et l’ensemble des services SPST pour leur implication et leur engagement au service de la santé, de la sécurité et des conditions de travail des salariés. Également la délégation pointe les difficultés du SPST dans un contexte de ressources contraintes et rares, avec des sollicitations de la DIR multiples, des réunions nombreuses, des obligations présentielles, et des taux d’absence aux visites périodiques atteignant jusqu’à 25%.
La délégation CFE-CGC constate aussi l’absences des RAA des médecins du travail de Lannion Dr Jahier et Dr Dazin ainsi que de celui du Dr Benmouna sur Biot (Sophia).
L’augmentation des visites occasionnelles en 2022 par rapport à 2019, donc hors périodes Covid 2020 et 2021, à la demande notamment du salarié, est conséquente. Elle traduit la médicalisation de certaines situations plus du domaine managérial ou de la QVT, comme les demandes de télétravail supplémentaire ou total à 100%, la demande de matériel supplémentaires (écrans, autres matériels informatiques, fauteuils ergonomiques, ...etc) traduit la dégradation des conditions de travail. Le SPST, à défaut de la hiérarchie, ou des RH, éloignées, et souvent en surcharge, apparaît comme le dernier recours des personnels. Dans tous les RAA, on constate une augmentation des visites occasionnelles, exemple à OG, périmètre du Dr Lévy-Amon, +30% entre 2022 et 2019 sur les visites à la demande du salarié, comme sur celles à la demande du médecin du travail. Nous en déduisons plus de stress, de mal-être et de souffrance au travail provenant de l’inadéquation entre les besoins des salariés et leur poste de travail, l’aménagement souhaité de leur temps de travail, de conflits interpersonnels, de décisions subies et perçues comme négations de la qualité du travail.
Dans les RAA, les personnels apparaissent comme stressés par de nombreuses réorganisations (ITS avec disparition de SOFT et IVA, CASE, IPL, GRN), des transformations immobilières (New Meylan, New Atalante, New OG, New SQY …) visant le flex-office généralisé, guidées seulement par l’optimisation financière à court terme, et des nouveaux outils numériques, des processus de plus en plus complexes et consommateurs de temps, ce qui induit des RPS, sans compter les transformations technologiques et celles liées aux méthodes.
Tous ces changements souvent concomitants déstabilisent les collectifs de travail, et les salariés, et génèrent des RPS.
Les départs en TPS massifs, conjugués aux prises de CET, ont lieu de manière abrupte, et les personnels restant se retrouvent en surcharge de travail, avec des expertises qui ont disparu, des abandons de projet, et avec en ligne de mire la nécessité de prolonger leurs années de travail encore plus longtemps.
Les personnels n’ont pas assez de temps pour s’adapter et recréer des collectifs détruits par les réorganisations, les transformations, les départs en TPS, voire les démissions. C’est à l’entreprise de considérer le côté humain, et au-delà de la QVT en top down, de définir et de mettre en œuvre une véritable politique de prévention primaire et secondaire des risques.
La charge de travail augmente, le stress aussi, et voici des chiffres pour l’illustrer. Sur le périmètre OG traité dans le RAA du Dr Laurence Lévy Amon qui a mis en place le questionnaire QOST avec 260 réponses analysées, et dont nous saluons l’initiative. Les points suivants sont constatés :
- Point 1 Charge de travail
Sur les résultats, 44% se plaignent de surcharge de travail, contre 31% en 2020, et 1% de sous-charge, quels sont les plans d’action de la DIR pour pallier la sous-charge comme la surcharge de travail ?
- Point 2 Niveau de stress ressenti,
19% des salariés sont en stress fort, et 65% en stress moyen.
Quelles sont les initiatives de la Direction pour y remédier ?
En ce qui concerne le télétravail, nous vous assurons qu’il est considéré positivement par les personnels. Pourquoi serait-il une cause de sédentarité et de manque d’activité physique selon les RAA ? Les temps de trajets libérés (embouteillage ou transports collectifs justement sédentaires), peuvent être remplacés par du temps pour soi notamment pour faire du sport (temps gagné et fatigue en moins en particulier en région parisienne où les temps de transport sont particulièrement longs et épuisants).
Le télétravail est considéré par 95% des salariés comme apportant l’équilibre vie privée/vie pro et comme un palliatif à la dégradation des conditions.
En outre, le télétravail répond à la logique RSE dans laquelle l’entreprise est engagée. En effet, il permet d’économiser de l’énergie et des coûts immobiliers, d’améliorer l’équilibre vie privée/vie pro et de rendre les salariés plus productifs et plus autonomes.
Nous proposons plus de souplesse dans le télétravail en simplifiant les processus avec par exemple l’attribution d’un volume annuel de jours de télétravail. En outre, comme il apparait que les managers ne prennent pas sur eux d’endosser les responsabilités de cette souplesse, et que cette souplesse est subjective, nous proposons que le télétravail soit attribué par défaut aux salariés pour un volume annuel minimum à déterminer, sauf à ceux qui refuseraient cette option (certains ne peuvent le pratiquer ou ne veulent pas de télétravail ou leurs activités ne sont pas compatibles), et à ceux qui obtiendraient un volume supérieur.
Dans le RAA du Dr Jocelyne Mautin, à Atalante, la délégation CFE-CGC constate avec désolation que des collègues féminines subissent des comportements inappropriés ou sexistes de la part de collègues masculins, qui montre un ‘ostracisme numérique’ (sic), une volonté de mise à l’écart des projets, et des réflexions sur leur pseudo-incapacité. Nous remercions le Dr Mautin d’avoir partagé de tels comportements répréhensibles. Nous posons une alerte sur ces agissements et demandons à la Direction d’intervenir sans attendre pour mettre fin à de telles pratiques. De plus, nous demandons à la Direction d’envisager des actions de prévention primaire pour lutter contre de tels comportements. Et une source d’inquiétude supplémentaire apparaît : S’il y a des comportements sexistes à Atalante, il est à craindre que ce soit également le cas sur d'autres sites.
En outre, les RAA des médecins du travail font état d’une perte de sens du travail, liée aux nombreuses réorganisations et transformations de tout type, ainsi que de désengagement et de démotivation, appelées selon le Dr Montmayeur, qui gère le site de Meylan Innovation, mais aussi d’autres divisions nationales et directions opérationnelles en AURA, le ‘great quiet quitting’.
Est également pointée comme cause de cette perte de sens, l’absence perçue de futur pour le poste du salarié, pour la division innovation France, voire pour Orange, d’où la demande adressée à la nouvelle direction d’une stratégie et d’une feuille de route clairement définies. Les RAAs soulignent aussi la baisse de la fierté d’appartenance à Orange, due à la qualité du travail empêché, aux mouvements incessants, à l’éloignement géographique du management de proximité et des cadres RH, aux équipes multisites et multi-pays, au manque de dialogue et d’échanges directs, à la complexité de processus ‘kafkaiens’, ainsi qu'à l’opacité des prises de décisions.
Par Sophie Nachman
- RAA : rapport annuel d’activité 2022 du médecin du travail
DIR : direction ou employeur
AURA : Auvergne Rhône-Alpes
RPS : risques psychosociaux
SPST : service de prévention et de santé au travail
QOST: questionnaire Orange santé au travail