Actions gratuites: le Jeux de dupes.
Rédigé par Héléne Marcy, présidente de l'ADEAS le . Publié dans Participation, Intéressement et Actionnariat.
Stéphane Richard l'avait promis en 2010. Mi 2011, le nouveau dispositif d'attribution d'actions gratuites, dont les principes ont été approuvés par le Conseil d'Administration (CA), est en cours de présentation aux représentants du personnel, dans les CE et au Comité Groupe Monde. Son règlement définitif doit être approuvé par le CA le 27 juillet 2011.
Le programme porte sur l'équivalent de 20 millions d'actions pour un montant de 300 millions d'euros, ré-évaluable en fonction du cours de l'action.
Comparée à l'opération « NExT Reward» initiée par Didier Lombard en avril 2007, cette nouvelle opération présente un point fort : elle sera potentiellement accessible à tous les personnels du Groupe dans le monde, hors membres du Comex. Mais elle est aussi beaucoup plus complexe... et masque une nouvelle manipulation financière tout à fait scandaleuse.
Surtout des conditions...
Pour bénéficier des actions gratuites,les personnels devront être présents dans l'une des sociétés consolidée à 100% dans les résultats du Groupe, du 1er juin 2011 au 31 décembre 2013.Toutefois, les dirigeants des filiales pourront choisir d'y adhérer ou non, notamment si France Télécom y détient une participation minoritaire.
Dans les pays d'Europe de l'Ouest, l'attribution correspondra à 133 actions. Dans les autres pays, elle sera au minimum de 20 actions, et au maximum de 200 (ou leur équivalent en cash selon la fiscalité du pays), en fonction du niveau de vie local. Ce critère rend déjà difficile l'évaluation de l'égalité réelle d'attribution pour tous les personnels.
Les actions seront disponibles à la vente le 27 juillet 2015.
... et une condition d'une perversité inouïe !
Mais surtout, pour que la distribution ait lieu, il faudra que pour 3 exercices complets, de 2011 à 2013 inclus, l'objectif de Cash Flow Opérationnel soit atteint. Or, le Cash Flow Opérationnel se dégrade en cas d'augmentation des investissements: il s'agit donc d'engager les personnels dans la poursuite d'objectifs de court terme, néfastes pour la pérennité de l'entreprise.
Pire : si l'objectif n'est pas atteint, les actions gratuites ne seront pas distribuées, diminuant d'autant les provisions pour charges de l'entreprise... et faisant donc remonter l'indicateur sur lequel la Direction se base pour distribuer des dividendes exorbitants.
La rétribution des personnels en actions gratuites servira donc de variable d'ajustement pour garantir les résultats annoncés aux marchés financiers... et leur assurer ainsi le maintien du dividende promis, quelles que soient les performances de l'entreprise !
Émettre des actions nouvelles pour la distribution aux personnels
La CFE-CGC/UNSA et l'ADEAS condamneront vigoureusement tout rachat d'actions sur le marché pour les distribuer aux personnels.
Lors de l'opération NExT Reward*, ce mécanisme a coûté plus de 210 millions d'euros à l'entreprise, dont 50 ont disparu en fumée entre le début et a fin de l'opération compte tenu de la chute du cours, alors qu'une émission d'actions nouvelles aurait eu un coût négligeable pour l'entreprise.
Il est inacceptable que les fonds propres ou l'endettement servent à financer une opération de rachat de titres, Ces ressources doivent prioritairement aller à l'investissement.
La rétribution des personnels devient de plus en plus variable, complexe et illisible. Intéressement exceptionnel, abondements PERCO ou distributions d'actions gratuites creusent en outre les inégalités entre les personnels : seuls ceux qui n'ont pas besoin de leur argent tout de suite et qui ont le temps de se consacrer à l'analyse détaillée des « bons coups » à faire en bénéficient vraiment.
C'est pourquoi la CFE-CGC/UNSA et l'ADEAS militent pour l'augmentation des salaires fixes, garantis et tangibles pour tous. L'augmentation de salaire reste la meilleure reconnaissance de l'engagement des personnels qui ne soutient le cours que de manière très temporaire, comme l'expérience le montre.
*Voir la précédente lettre de l’Épargne :
et le communiqué de la CFE-CGC/UNSA :