Plan Partageons : le grand plongeon !
Rédigé par H. Marcy et P. Brunet le . Publié dans Participation, Intéressement et Actionnariat.
133 actions pour tous ?
Le 27 juillet 2011, le Conseil d’Administration de France Télécom a arrêté les modalités du plan « Partageons », autorisé par la 21ème résolution de l’Assemblée générale du 26 mai 2009. Il s’inscrit dans le projet « Conquêtes 2015 », lancé le 5 juillet 2010, et prévoit que chaque collaborateur travaillant dans l’une des sociétés participantes au 1er juin 2011, se verra attribuer un nombre identique d’actions (ou une compensation monétaire équivalente en fonction du pays). L’attribution est prévue au 27 juillet 2015. En France, chaque collaborateur pourrait ainsi bénéficier de 133 actions gratuites, près de 20 millions d’actions étant dédiées à ce plan.
Un piège fatal : la condition de performance du cash- flow opérationnel
Pour que l’attribution ait lieu, l’entreprise doit atteindre un cash-flow opérationnel cumulé (EBITDA - CAPEX) de 27 milliards d’euros, hors éléments exceptionnels, pour la période 2011 à 2013. S’il n’est pas atteint, les actions ne seront pas distribuées.
Dès le lancement du plan, l’ADEAS et la CFE-CGC/UNSA ont dénoncé un objectif qui pousse l’entreprise à baisser ses investissements, au détriment de sa pérennité, mais qui permet également, si l’objectif n’est pas atteint, d’alléger les provisions pour charges, et donc d’améliorer les résultats présentés aux marchés financiers.
La rétribution des personnels sert, une fois de plus, de variable d’ajustement.
L’objectif ne sera pas atteint
Si le cash-flow opérationnel a dépassé l’objectif en 2011, atteignant 9,3 Milliards d’euros, il s’est replié à 8 Milliards d’euros en 2012. Pour atteindre l’objectif du plan « Partageons », il faudrait donc dégager près de 10 Milliards d’euros de cash-flow opérationnel sur l’exercice 2013.
Mission impossible dans le contexte de baisse du chiffre d’affaires et des marges induit par l’arrivée du 4ème opérateur mobile sur le marché français et la situation économique qui diminue le pouvoir d’achat des consommateurs dans toute l’Europe.
15 millions d’actions rachetées en pure perte !
Dès juillet 2011, la CFE-CGC/UNSA et l’ADEAS avaient demandé que les actions nécessaires à ce plan « Partageons » fassent l’objet d’émissions nouvelles à l’issue du plan, et non d’un rachat de titres sur le marché, toujours beaucoup plus coûteux.
Néanmoins, entre le 9 août et le 30 septembre 2011, l’entreprise a procédé à plusieurs rachats d’actions successifs, plus de 15 millions de titres, pour un montant total de 185 millions d’euros… sans compter les frais financiers associés, l’entreprise s’endettant pour effectuer ces achats… dont la valeur boursière n’est plus, au cours de l’action du 7 mai 2013, que de 125 millions d’euros ! 60 millions d’euros se sont ainsi évaporés !!!
Gonflement artificiel des résultats 2013
A la clôture de l’exercice 2013, les objectifs du plan ne seront pas atteints, et les provisions passées en prévision du versement de près de 20 millions d’actions au personnel seront annulées. L’indicateur qui sert de base au versement des dividendes en sera revalorisé d’autant, et permettra d’atteindre les résultats annoncés à la communauté financière.
L’exercice 2013 de France Télécom sortira en conséquence renforcé de l’échec du plan « Partageons ». Beau résultat !
Que deviendront les actions rachetées par l’entreprise ?
La CFE-CGC/UNSA et l’ADEAS proposent d’utiliser une partie des titres pour solder le litige « Orange Success 2007 ». La décision du Conseil d’État, obtenue suite à notre action conjointe, n’a en effet jamais été suivie d’effet, et les 33 000 collaborateurs du Groupe qui auraient du recevoir 188 actions chacun n’en ont reçu que 29, au mépris de la loi, et sans aucune autre forme de compensation.
Nouvelle offre au personnel ?
Si l’État cède une partie du capital qu’il détient, conformément aux lois de privatisation de France Télécom, il devra réserver 11% des actions cédées aux personnels de l’entreprise et procéder à une nouvelle ORP (offre réservée au personnel).
La CFE-CGC/UNSA et l’ADEAS exigeront que le litige « Orange Success 2007 » soit soldé avant toute nouvelle opération.