Emploi : ce qui nous attend à France Télécom-Orange
Rédigé par Hélène MARCY le . Publié dans CAP & CCP 2013.
Nous sommes tous concernés par les suppressions de postes qui vont intervenir massivement dans les 3 prochaines années, compte tenu notamment des départs en retraite, qui ne seront pas compensés par les 4 000 embauches prévues par la Direction.
Si les salariés de droit privé apparaissent plus exposés au risque de licenciement, tous les personnels seront impactés par la charge de travail supplémentaire à absorber pour compenser un déficit d’au moins 8 000 personnes d’ici fin 2015.
La CFE-CGC/UNSA se mobilisera tant sur la demande d’effectifs de remplacement que sur l’organisation à mettre en place dans les équipes pour gérer les départs, qu’il s’agisse de la répartition des charges ou du transfert des compétences, qui sont loin d’être correctement anticipés dans toutes les entités.
L'emploi est l'un des thèmes clefs de notre action et de notre campagne pour les élections CCP.
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Pour 2013-2015, 4 000 embauches ont été annoncées au sein du Groupe en France. Dans le même temps, les départs en retraite s’accélèrent : environ 9 000 sont prévus sur la même période. Par ailleurs, 1 000 à 1 500 personnes quittent l’entreprise chaque année, le plus souvent des salariés
de droit privé, pour rejoindre une autre entreprise ou développer un projet personnel. Au final, il y aura donc bien entre 8 000 et 9 500 suppressions de postes à France Télécom-Orange sur les 3 prochaines années.
Le discours des dirigeants qui proclament « vous avez de la chance, chez France Télécom-Orange, on embauche » est donc une imposture, destinée à justifier toutes les dérives, qu’il s’agisse de la pression sur les équipes, de la rémunération en berne (intéressement et participation s’annoncent en baisse
pour 2013, et la Direction a déjà indiqué qu’elle ne serait pas généreuse lors de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires), des promotions en panne, des effectifs ou des outils insuffisants pour atteindre les objectifs, voire le piétinement délibéré du droit et le retour des mobilités forcées pour ceux dont les boutiques seront fermées ou les services réorganisés.
Autant de pratiques qui rappellent de bien mauvais souvenirs et contre lesquelles luttent la CFE-CGC/UNSA et la C.F.T.C. Les managers qui comprennent la situation soutiennent ces combats.
L’emploi malmené dans les Télécoms
Depuis l’ouverture des télécommunications à la concurrence en 1998, 29 000 emplois ont été détruits chez les opérateurs télécoms français… à rebours des
promesses faites au moment de la libéralisation du marché.
Depuis début 2012, les annonces de licenciements s’accélèrent. Bouygues Telecom a mis en place un plan de départs volontaires concernant 556 salariés.
Chez SFR, le plan présenté en comité central d’entreprise se soldera par 856 suppressions de postes, si les 267 créations promises en parallèle sont bien
réalisées. Ne parlons pas des équipementiers tels Alcatel-Lucent, régulièrement éprouvés par les plans sociaux, ou des centres d’appels qui s’apprêtent, eux aussi, à comprimer leurs effectifs.
À France Télécom-Orange,la situation est plus complexe
Aucun plan de licenciement collectif ne peut intervenir : la présence de fonctionnairesl’interdit. C’est cependant l’entreprise qui a supprimé le plus de postes - près de 55 000 entre 1998 et 2009 - avant de recommencer à en créer, sous la pression des organisations syndicales qui, à l’issue de la crise sociale, ont obtenu la promesse de 10 000 embauches sur la période 2010-2012.
Fin 2011, un peu plus de 5 000 postes avaient été recréés au sein du Groupe
en France, et la Direction assure que toutes les embauches promises ont bien été réalisées fin 2012. Mais, il s’agit trop souvent de contrats d’apprentissages ou de CDD ! La publication des effectifs officiels en fin d’exercice permettra d’identifier, au final, combien d’emplois auront réellement été créés ces trois dernières années dans notre Groupe.
Les logiques financières détruisent l’emploi
Depuis 1998, l’ensemble de la filière des télécoms a détruit plus de 50 000 emplois, presque autant que la restructuration de la sidérurgie dans les
années 70-80. Jusqu’en 2008, le marché français des télécommunications était pourtant en croissance continue (le chiffre d’affaires global des opérateurs
a quasiment été multiplié par 2 entre 1998 et 2008), les abonnements à Internet et au mobile ont largement pris le relais de l’ancienne téléphonie fixe.
Les télécoms sont à la fois au coeur de l’activité économique contemporaine et en évolution constante pour faire face à la demande croissante de débit
et de services sur les réseaux fixes et mobiles. Comment expliquer (et justifier) que ce secteur ait détruit autant d’emplois, et s’apprête à en détruire davantage encore ?
Une régulation irresponsable, focalisée sur la concurrence au détriment des emplois
La régulation européenne du secteur, relayée par le régulateur national des télécoms (ARCEP), est uniquement focalisée sur la concurrence et la baisse
des prix. Cette baisse profite aux consommateurs… mais détruit les emplois de la filière en France et en Europe. Les emplois potentiellement recréés par
le pouvoir d’achat rendu aux consommateurs ne le seront pas tous dans notre pays, ni dans les mêmes proportions, et les destructions d’emplois s’opèrent
beaucoup plus rapidement que les créations. Quand il n’y aura plus de salariés, restera-t-il des consommateurs ?
La violente contraction du prix des abonnements mobiles liée à l’apparition du 4ème opérateur, gratifié par la régulation d’un modèle économique beaucoup
plus favorable que celui de ses concurrents, s’accompagne d’une perte d’emplois significative : les annonces déjà faites se traduiront par 10 000 emplois
supprimés dans la filière française des télécoms dès 2013. La seule étude sérieuse sur le sujet, menée par l’économiste Bruno Deffains, en pronostique
entre 50 et 70 000 d’ici à 2015.
La baisse des prix engendre une baisse globale des revenus pour l’ensemble des opérateurs français, qui incite chaque acteur à accélérer la recherche de gains de productivité… et peut même servir de prétexte pour justifier des suppressions d’emplois prévues de longue date (et retardées pour des raisons politiques).
Des actionnaires prédateurs
La recherche des gains à court terme, sous la pression d’actionnaires spéculateurs (on ne peut plus parler d’investisseurs quand le temps moyen de détention
d’une action cotée en Bourse est tombé à… 22 secondes) qui exigent des dividendes exorbitants et des perspectives de profit toujours plus élevées, génère les effets que l’on connaît bien désormais : rien de tel que l’annonce de suppressions de postes pour faire remonter le cours boursier d’une entreprise.
À France Télécom-Orange, l’État lui-même a exigé le maintien du dividende à 1,40 € par action, siphonnant l’intégralité des bénéfices voire au-delà certaines années, alors que l’entreprise avait besoin de cash pour poursuivre son désendettement et investir dans les réseaux de nouvelle génération, fibre et 4G. Pour l’exercice 2012, le dividende sera ramené à 0,80 €, mais M. Richard lui-même vient de reconnaître, devant les élus du CCUES, qu’il aurait été préférable de le baisser plus tôt. (Rappelons que la CFE-CGC/UNSA se bat sur ce point depuis... 2006 !!)
Le maintien de la marge et du cash-flow après de telles ponctions se traduit par des plans d’économie de plus en plus sévères, qui se succèdent sans
interruption, et par la compression des effectifs.
Les organisations syndicales en première ligne
Quand les discours officiels font l’impasse sur les suppressions d’emplois réalisées sans plan social, les représentants des personnels doivent faire preuve d’une vigilance accrue pour défendre un niveau d’emploi compatible avec des conditions de travail décentes pour chacun.
Au sein de l’UES France Télécom-Orange, l’élection des représentants aux Commissions Consultatives Paritaires (CCP) constitue pour l’ensemble des personnels qui votent entre le 5 et le 12 février 2013 (salariés de droit privé, contractuels de droit public, fonctionnaires en détachement) l’occasion de choisir des experts du droit du travail aptes à les défendre efficacement contre les sanctions et licenciements abusifs que certains managers pourrait être tentés d’appliquer dans un contexte économique et concurrentiel qui se durcit.
C’est aussi l’occasion de renforcer le poids et la parole d’organisations syndicales qui :
- au sein du Groupe France Télécom-Orange, défendent une politique de l’emploi digne de ce nom, dans le cadre des négociations de la GPEC (Gestion Prévisionnellede l’Emploi et des Compétences), de la rémunération (salaires,mais aussi intéressement et participation), ou des projets de réorganisationsprésentés à vos élus dans les CE et au CCUES,
- au-delà de l’entreprise, portent jusqu’aux décideurs (Gouvernement,Assemblée Nationale, Arcep, Autorité de la concurrence, CommissionEuropéenne…) des analyses argumentées et des propositions concrètesvisant à retrouver une croissance saine et porteuse d’emplois dans la filière des télécoms, pour garantir nos carrières et celles de nos enfants.