AG des actionnaires d’Orange le 27 mai 2015 : la politique de la « terre brûlée » se poursuit !
Rédigé par Hélène MARCY le . Publié dans Communiqués de Presse.
Communiqué commun CFE-CGC et CFTC Orange
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CdP CFE-CGC-et-CFTC-Orange AG-des-actionnaires-Orange 26mai2015.pdf
Alors que l’Assemblée Générale des actionnaires sera l’occasion, chez Orange comme ailleurs, de quelques escarmouches avec les investisseurs institutionnels sur la question des droits de vote double (application de la Loi Florange), les personnels d’Orange sont avant tout inquiets d’une politique financière qui continue d’épuiser les ressources de l’entreprise, au détriment de ses capacités à faire face aux nombreux défis qu’elle doit affronter.
Dividende supérieur au bénéfice, obligations perpétuelles coûteuses qui masquent l’endettement réel de l’entreprise, refus de l’Etat à percevoir ses dividendes en actions sont les signes préoccupants d’une stratégie financière à la dérive.
Les personnels actionnaires d’Orange présentent plusieurs résolutions, ayant notamment pour objectif de limiter le montant du dividende ou de son versement en cash.
Pour le 3ème exercice consécutif,
Orange verse plus de dividende que son résultat net consolidé
Au titre de l’exercice 2014, Orange versera, une fois de plus, un dividende supérieur au bénéfice (0,60 € par action, pour 0,36 € de résultat net attribuable aux propriétaires de la maison mère).
Si en réponse à la question d’un salarié actionnaire lors de l’AG 2013, S. Richard avait admis qu’il aurait fallu baisser le dividende dès 2012, il a depuis rallié le discours de l’intelligentsia financière, qui prétend qu’il n’y a pas d’anomalie à ce que le dividende ne soit pas corrélé au bénéfice mais au « free cash flow ». C’est ainsi que, depuis le début de sa mandature, Orange a distribué 13 milliards d’euros de dividendes pour 12,4 milliards d’euros de résultat net consolidé.
Chaque année, l’entreprise vend des actifs …:
- en 2011/2012 : cession d’Orange Suisse, racheté en 2014 par Xavier Niel (Iliad/Free) ;
- en 2014 : cession d’Orange Dominicana, pourtant rentable, à Altice, la holding de Patrick Drahi (Numericable et SFR) ; cession d’Orange Ouganda, pourtant en Afrique, zone géographique prioritaire de l’expansion internationale d’Orange.
- en 2015 : cession de la co-entreprise EE à BT au Royaume Uni : la marque Orange disparait définitivement de son territoire d’origine ;
… ou lève des emprunts pour payer le dividende, comme nous avons pu le constater certaines années, où les annonces d’emprunts obligataires coïncidaient étrangement avec les échéances de versement du dividende.
Des milliards qui font défaut à l’entreprise et à l’économie française,
pénalisant l’emploi
45% des actionnaires de l’entreprise sont des fonds de pension étrangers. Autant d’argent qui manque donc à l’investissement et à l’emploi, non seulement pour le Groupe Orange… mais pour toute l’économie française. Alors que l’Etat français reste majoritaire dans le capital de l’entreprise, et que « la courbe du chômage » est bien loin de « s’inverser », une telle politique laisse perplexe…
Le Groupe Orange recommence à perdre massivement des emplois, la pyramide des âges des personnels français étant considérée comme une aubaine pour faire baisser la masse salariale. D’ici à 2020, 30 000 départs sont anticipés. En effectifs, ils ne seront remplacés qu’à raison d’1 sur 4 (1 sur 3 en équivalents temps plein). Cela engendre simultanément une surcharge de travail et une perte de compétences, fortement préjudiciables à l’atteinte de l’objectif défini comme prioritaire de « délivrer une expérience client incomparable », qu’il s’agisse de la qualité des réseaux et services ou de l’accompagnement des clients.
L’endettement remonte de manière tellement inquiétante
qu’il devient nécessaire de le dissimuler dans des obligations perpétuelles
La présentation des résultats 2014 met en avant la baisse du ratio dette nette / EBITDA, qui passe à 2,09 (contre 2,37 en 2013). Mais c’est via l’émission d’obligations subordonnées perpétuelles (2,8 milliards d’euros en janvier 2014 , et 3 milliards d’euros en septembre). Ces obligations peuvent être inscrites en capitaux propres ou en passif financier dans les comptes de l’entreprise. La Direction d’Orange a choisi la première solution, pour diminuer artificiellement son taux d’endettement (présentation des résultats, p 18), mais l’argent n’en est pas moins dû… et surtout les taux d’intérêts attachés à ce type d’instrument financier sont très supérieurs à ceux d’un endettement classique (les 5,8 milliards d’euros d’obligations perpétuelles coûteront plus d’un milliard d’euros) . La Direction privilégie donc l’affichage de ratios flatteurs, au mépris de la charge financière qu’elle fait supporter à l’entreprise.
Toujours aussi piètre actionnaire, l’Etat veut du cash.
Les représentants du personnel demandent depuis plusieurs années que l’entreprise offre aux actionnaires qui le souhaitent la possibilité de percevoir leur dividende en actions. Cette option rencontrerait notamment la faveur d’un certain nombre de salariés actionnaires, et permettrait d’économiser chaque année plusieurs dizaines de millions d’euros de cash.
Mais l’Etat se moque visiblement de la préservation des ressources financières de l’entreprise : dans les sociétés dont il est actionnaire, les Ministères du Budget et de l’Economie demandent aux Directions de maintenir une bonne rémunération des actionnaires, mais aussi de la lui verser en cash. Une fois de plus, on est en contradiction flagrante entre les discours politiques et la politique menée !
Les salariés actionnaires se mobilisent
Les fonds de l’actionnariat salariés d’Orange proposent cette année plusieurs résolutions au vote de l’AG des actionnaires, en vue de faire baisser l’impact financier du dividende. Ils ont également entrepris les démarches nécessaires pour que les personnels actionnaires d’Orange disposent dès l’AG 2016 des droits de vote doubles prévus par la Loi Florange.
Ils entendent ainsi réaffirmer le rôle des personnels en tant que « partie prenante », et s’exprimer sur la stratégie de l’entreprise, y compris financière, dont la Direction se réserve le monopole dans les instances du dialogue social.
Les personnels d’Orange demandent
que l’investissement soit privilégié pour préparer le futur de leur entreprise.
La fameuse « société de l’information » connaît actuellement une phase de mutation accélérée. Augmentation des débits, développement des services, diffusion accrue de contenus, croissance exponentielle du « Big Data » et de ses exploitations, pression concurrentielle de plus en plus forte : autant d’éléments qui nécessitent d’investir, dans les infrastructures, dans la recherche & développement, mais aussi dans les femmes et les hommes, dont il faut préserver, actualiser et développer les compétences pour faire face aux nouveaux défis, sur l’ensemble des territoires où opère le Groupe Orange. Pour pouvoir être acteur des consolidations en cours et à venir, encore faut-il avoir un « trésor de guerre ». Dans l’état actuel, pour fusionner avec Jazztel en Espagne, il faut se désengager totalement du Royaume-Uni !!
Mettre les actionnaires à contribution pour préserver les capacités financières d’Orange serait un bon signal pour crédibiliser le plan stratégique « Essentiel 2020 ».
Notre appel sera-t-il entendu avant qu’il soit trop tard ?
Economie et Réglementation des Télécoms Participation, Intéressement et Actionnariat