Déclaration préalable : intergénérationnel, sous-recrutement et miroir aux alouettes
Rédigé par Stéphanie CRESPIN le . Publié dans INNOV.
Comme vous le savez, la CFE-CGC Orange a exprimé publiquement son avis concernant l’accord intergénérationnel.
Les raisons qui l’ont poussée à ne pas signer cet accord sont liés à trois principaux constats :
- Un recrutement de 8 000 jeunes en 3 ans !
Un nombre totalement insuffisant qui en réalité ne compense même pas le remplacement des départs naturels, ni même ceux escomptés avec le dispositif TPS !
Un nombre surprenant quand on sait déjà que les recrutements s’opéreront majoritairement en filiale ou sur nos territoires de présence hors France, - Des temps de « respiration » accordés aux personnels vendus comme une innovation !
Rien de neuf évidemment au regard de l’année sabbatique (Congé sabbatique : ce que dit le code du travail (travail-emploi.gouv.fr)) ou des dispositions conventionnelles déjà existantes, telles que le PPA (Projet Personnel Accompagné) en vigueur au sein d’Orange depuis plus de 10 ans, - Un nouveau dispositif de Temps Partiel Senior (TPS) qui, s’il permet aux personnels en fin de carrière d’être exonérés de leurs activités avant un départ à la retraite en contrepartie d’une réduction de salaire, représente un défi de taille face à l’ampleur des départs attendus (entre 6 000 et 10 000).
Fort de ces trois principaux constats, la CFE-CGC insiste sur le fait que cet Accord Intergénérationnel ne peut être mis en œuvre sans mise en regard avec d’autres accords pensés : GPEC (Gestion Prévisionnelle de l’Emploi et des Compétences), égalité professionnelle, vie privée/vie pro, ou encore télétravail.
La CFE-CGC, soulignant le départ d’une force au travail aussi importante, insiste en outre sur le fait qu’il ne peut être compensé que par un ensemble d’autres dispositifs pour notamment :
- contenir une charge de travail qui ne saurait que croître, face à une baisse des effectifs et une augmentation inéluctable de productivité,
- palier le défaut de compétences généré par des départs, et assurer une pérennité des savoirs en organisant la transmission des expertises,
- anticiper une réallocation des ressources des fonctions supports vers les centres de production au travers d’une déclinaison opérationnelle de la GPEC pour l’Innovation Groupe,
- prévoir des demandes d’augmentation du temps de travail sur la base du volontariat qui ne peuvent se faire qu’en contrepartie de hausse de salaires,
- enrayer une augmentation du recours à la sous-traitance mettant à mal la stabilité sociale de notre pays : le cas du sous-traitant Scopelec est à ce titre emblématique, comme peut l’être tout recours à des travailleurs détachés ou délocalisés,
- mettre en place un programme de rétention des compétences clefs pour valoriser des compétences acquises et aussi les reconnaître ; sans reconnaissance, la volonté de transmettre des salariés qui, malgré leur âge restent des acteurs essentiels au fonctionnement de l’entreprise, est abîmée.
Enfin, la CFE-CGC, précise que l’absence d’engagement de la Direction, soumise à une nouvelle gouvernance et en en quête d’un nouveau modèle économique, légitime le fait de ne pas accorder un blanc-seing à une politique de réduction massive d’emplois, dont le fil conducteur semble plus être celui de la réduction des coûts du plan Scale- Up annoncé aux marchés financiers, que celui d’une l’efficacité opérationnelle qui permettrait de mieux servir nos clients.
Au demeurant, la CFE-CGC s’interroge sur ce qui peut bien motiver les salariés à ces départs précipités qui, à regarder de plus près, ressemblent à s’y méprendre à un véritable miroir aux alouettes. Autrement dit : un leurre.
Pour votre information, le miroir aux alouettes est une expression qui à l’origine était un piège utilisé par les chasseurs pour capturer les alouettes. Grâce à des morceaux de miroirs fixés sur des bouts de bois, les chasseurs créaient des reflets en les agitant.
Il est indispensable que les représentants du personnel apportent toute leur attention pour éviter que les salariés de notre Groupe ne se retrouvent, une fois à la retraite, empêtrés dans les conséquences financières de ce leurre. L’impact de ce dispositif sur la retraite est considérable et nombreux sont celles et ceux qui, arrivés à l’âge de la retraite, parce que mal informés, pourront considérer que leurs engagements professionnels ne seront pas reconnus et salués par un pouvoir d’achat qui aura fondu comme neige au soleil !
Les conditions de travail chez Orange et notamment au sein d’Orange Innovation seraient-elles si insupportables ? La pression serait-elle si forte pour souhaiter partir au plus vite ? Serait-ce le reflet d’un profond mal être au travail ?
La CFE-CGC estimerait utile, voire indispensable, que la Direction étudie les raisons qui pourraient pousser autant de salariés à quitter si vite notre entreprise…
A la CFE-CGC, nous aussi nous préparons le futur et construisons le présent et en ce sens, nous n’inciterons pas les salariés à foncer tête baissée dans ces dispositifs ! Cette fuite de cerveaux est une véritable perte pour notre Groupe et aura un fort retentissement sur celles et ceux qui continueront à travailler dans notre entreprise.
Comme depuis toujours, la CFE-CGC sera extrêmement vigilante sur les conséquences de ces départs en nombre, sur l’accroissement de la charge de travail non maitrisé, sur les risques de perte de sens, l’isolement, les pressions diverses et variées que pourraient avoir ces nombreux départs sur toutes celles et tous ceux qui restent ! Sans oublier celles et ceux qui ne veulent pas partir et que l’entreprise pousserait vers la porte !
La CFE-CGC Orange demande qu’une analyse d’impact sur les volets économique et financier, ainsi que sur l’organisation du travail, la force au travail interne et externalisée, soit faite sur le périmètre de notre établissement, très clairement visé par cet accord.
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