ACSED : Avis de Tempête

Le 20 octobre dernier, l’ACSED (Association des cadres supérieurs et dirigeants du Groupe FT) organisait à la Maison de la Chimie un séminaire où intervenaient de nombreux dirigeants du groupe dont son PDG, Didier Lombard.

Des déclarations surprenantes et inquiétantes.

Le haut management tenait donc une occasion d’échanger « entre soi » sur des dossiers concernant l’ensemble de l’entreprise, qu’il s’agisse de la stratégie menée, du développement international, de la concurrence, de la réglementation et surtout de la politique sociale menée et de ses résultats. Nos principaux dirigeants confirmaient l’orientation prise depuis plusieurs mois, mais ils apportaient des éclairages nouveaux et livraient des informations exclusives qui ne manqueront pas de modifier profondément le paysage social de l’entreprise. Les propos tenus par bien des égards sont surprenants, inquiétants et parfois même incongrus. La première interrogation porte en effet sur le lieu de telles révélations: l’ACSED est certes une structure proche de FTSA, elle n’en reste pas moins une simple association, sans caractère légitime dans le dialogue social du groupe. Deux ans après la privatisation du groupe et l’application du Droit du travail à notre entreprise, il parait toujours aussi difficile à faire admettre à la direction que les IRP, les CE et le CCE au premier chef, doivent être obligatoirement les premiers interlocuteurs à devoir être légalement informés de mutations sociales de l’entreprise. On peut par ailleurs se féliciter de la très grande franchise des propos et de la verdeur du choix des mots (« crash programme »), l’ensemble constitue une sérieuse mise en menace du personnel alors que l’on annonce parallèlement 7 milliards de cash flow pour 2006… Cette grande légèreté dans la communication, explicable peut-être en partie par la spontanéité d’interventions orales, est renforcée par le recours à des formules ou d’anecdotes à brûle-pourpoint qui choquent le lecteur quand plus de 30 000 salariés au moins sont touchés par les mouvements de suppression de postes ou de mobilité forcée, qu’une grande majorité du personnel est impacté par la rigueur salariale qui aboutit à des pertes de pouvoirs d’achats répétées pour beaucoup. Pour donner plus d’explications à nos lecteurs, nous avons réalisé un florilège de déclarations, le texte intégral des tables rondes se trouvant bien évidemment, sur notre site. A vous de juger.

La stratégie :Didier Lombard « La stratégie (de l’opérateur intégré) que l’on a affichée en juillet 2005 se déroule convenablement et les autres opérateurs sont obligés de l’adopter également » « On rentre dans l’univers des services et dans celui des revenus de la publicité. Dans le monde des revenus de la facturation, on est dans le monde des opérateurs classiques et on souffre. Donc il faut aller dans cet univers de recettes venant de la pub»;« Nous portons sur notre dos la dette de plus de 40 Milliards d’euros et s’il y a le moindre charivari sur les taux on devient extrêmement vulnérables. Donc il faut continuer à rembourser la dette. Parallèlement, si on veut que les actionnaires restent avec nous il faut distribuer des dividendes au même niveau que nos concurrents. A partir de là, on pourra dire : on a réduit nos coûts de structure et on a un niveau de revenus, issus des nouveaux services, qui commence à se voir»; « On a notre idée de Service Public, tous les gênes qu’on a depuis l’origine, tout cela sera difficile à gommer. Je ne le verrai sûrement pas. Après vous pourrez faire n’importe quelle idiotie. Je dis idiotie parce que dans un pays le réseau télécoms et l’opérateur de télécom c’est un des actifs majeurs d’un pays. C’est comme le réseau d’électricité. Il ne faut pas chahuter avec çà. Ce sont les deux moteurs de l’économie »Louis Pierre Wenes : « : Réussir ACT, parce qu’on a besoin de construire notre future équipe, le plus vite possible, avec moins de niveaux hiérarchiques, avec plus de gens qui prennent le pouvoir »Georges Penalver : « Une priorité groupe, les 7 milliards de cash flow. Au niveau marketing, c’est de travailler au niveau de la filière marketing comme un seul bloc qui va dans la même direction »Olivier Barberot : « Pour moi, j’aurai échoué si on en fait pas les 22 000 départs. Pour le groupe c’est les 7milliards d’euros de cash flow »

L’univers réglementaireDidier Lombard : « on a compris que lorsqu’on est sous des pressions réglementaires qu’on ne maîtrise pas ce n’est la peine de donner des chiffres de prévision à la3èmedécimale qu’on ne tiendra pas. On ne leur adonné qu’un seul chiffre, le free cash flow. On ne communique plus les chiffres escomptés de croissance car cela dépend étonnement du régulateur. Les décisions prises à Bruxelles impactent le revenu et il fautun certain temps pour éponger l’effet de ces mesures. »« En principe, il y a 3 types d’interlocuteurs : l’actionnaire, le client et le salarié. Dans tous les pays du monde vous en avez un 4ème qui s’invite : le gouvernement. Il faut toujours être vigilant sur la façon dont vous négociez parce qu’on n’est pas négligeable dans l’économie du pays (Jordanie, Sénégal). Cela doit continuer dans lemme sens parce que si un gouvernement veut nous sortir, c’est très facile pour lui. »

La concurrenceLouis Pierre Wenes : « Il faut arrêter de s’auto flageller. Quand Free gagne 100 000 clients, nous en gagnons250 000, cette année nous avons augmenté notre parc de LiveBox, en un an, de la taille du parc total des freebox et nous sommes le premier fournisseur en France de Voix sur IP »

La politique socialeLouis Pierre Wenes : « Cela se traduit par ce que disait le Président : « je veux faire moins 22 000, plus six mille », cela veut dire : je veux améliorer ma productivité de 15% (5% par an). Ça paraît quelque chose de réaliste. Ce n’est pas la fin du voyage, car il y a des opportunités d’amélioration au-delà de 15% à périmètre égal (20 à 30%). »Didier Lombard : « la maison ne survivra pas si les fonctionnels ne veulent pas aller face aux clients. C’est une transformation profonde. Si on n’arrive pas à faire ça on n’échappera pas à des mesures plus radicales. Pour le moment je n’en veux pas. Mais si on n’y arrive pas je serai obligé d’y venir» Louis Pierre Wenes : « Sur le plan des IRP, un jugement nous oblige à avoir une unité économique et sociale entre les deux, donc on va avoir une petite négociation pour régler ça. On est tous dans le même bateau »Olivier Barberot : « Si on extrapole les chiffres et sion ne se mobilise pas très fortement d’ici la fin del’année, on risque d’être à 1000 au dessus del’objectif en France, qui se reporteront donc sur 2007.Or, ce qui nous remonte sur 2007 aggrave latendance constatée en 2006, on est donc dans unesituation critique. D’où le discours très direct duPrésident », «Je cherche 100 millions d’euros sur lecoût du travail et je me suis engagé à les trouver surle monde. (baisse d’effectifs mais aussirémunération) » « Dans les dispositions que jeprésenterai lundi, il y aura des dispositionsconcernant les coûts du travail. Il faudra penser à desmesures salariales. Quand dans un pays, l’emploisouffre et que des gens partent il faut que ceux quirestent ne soient pas trop malheureux. Il faut manierles deux outils, emploi et salaire mais pas dans lesmêmes proportions. Dans les pays où on a unproblème de sureffectifs (Pologne, GB, Espagne), laréponse salaire se traduit par une politiqueextrêmement sélective. En France en 2007 on varenforcer la sélectivité des augmentations »

Les "perles"Didier Lombard : « On a vendu Pages Jaunes au bon moment. Tous les opérateurs d’annuaires papier du monde se sont cassé la figure. (…) Le fonds qui a acheté Pages Jaunes va se payer sur la bête pendant 2 ans ! »Louis Pierre Wenes : « J’ai eu dans ma vie une expérience qui m’a marqué et peut vous montrer jusqu’où va la motivation bien que l’on ne soit pas dans le même cas. Quand j’étais en mission dans une société en situation économique difficile, il fallaits ortir 35% des personnes de la société. Cela aurait pu créer un climat épouvantable, et démotiver tout le monde. Une équipe a travaillé jour et nuit pour mettre le plan en place. Les gens de cette équipe ne savaient pas s’ils seraient dans le plan ou pas. Ils se sont dit c’est notre société, il faut la sauver » «Lors de la soirée d’inauguration d’Unik avec les VIP, le Secrétaire du CCE se plaint de ce que : « dans les centres d’appel aujourd’hui ils sont obligés de lire des scripts ! » Cela veut dire que pour lui la manière normale de travailler dans les centres d’appel est d’improviser la réponse. Si on fait ça je ne peux pas construire, pas progresser, pas aller de l’avant. J’ai un vrai problème avec ça. C’est peut-être comme le dit le président parce que je suis un « alsacien borné ». Moi j’aime les choses faites avec rigueur »Olivier Barberot : « On va être obligé de rentrer dans le problème de ces personnes qui ont une employabilité très faible. Il y a des gens qui refusent de bouger lorsqu’on ferme un site et qu’on leur demande d’aller travailler 23 Km plus loin ! »

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