CCUES 10 2019 : Intervention de Stéphane Richard (plan 2025)
Rédigé par Frédérique Limido-Milesi le . Publié dans Economie et Réglementation des Télécoms.
Stéphane Richard est venu partager quelques convictions sur la « raison d’être de l’Entreprise » (cf. Loi Pacte) et le plan 2025, dont il sera parlé plus précisément début décembre.
La « raison d’être » de l’Entreprise : la loi PACTE dispose que l’entreprise doit désormais être gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité. Elle peut même se doter d’une « raison d’être » dans ses statuts.
« Une opportunité pour Orange, avec une volonté de co-contruction » :
- avec les personnels (via une application à télécharger),
- des entreprises externes, des élus locaux, des investisseurs,
- des équipes de jeunes talents d’horizon différents,
- les partenaires sociaux,
- des cercles d’expertises, ONG, fournisseurs… qui travaillent plus étroitement avec Orange.
Le nouveau plan : 4 convictions pour 2025
1. Les Infrastructures et les réseaux
« Notre meilleure assurance vie, notre colonne vertébrale »… Et une stratégie en 2 volets :
- Fixe :
- les zones denses, AMI et RIP, en France, mais aussi en Espagne, et dans d’autres pays tels que la Pologne et l’Afrique ;
- la fibre optique;
- le maintien de la qualité sur le cuivre avec l’équation financière compliquée de revenus qui plongent et de niveaux de qualité très surveillés par le régulateur.
- Réseaux mobiles :
- des investissements massifs pour rester parmi les meilleurs (Orange est classée pour la 9ème année consécutive meilleure réseau mobile en France) ;
- l’accélération mondiale de la mutualisation des réseaux, avec la question du partage de réseau en France : Orange se pose la question du recours ou non à l’utilisation du modèle DT (créer un « véhicule » ressemblant les tours mobiles en gardant le contrôle) ;
- le grand succès de la 5G, mais pour laquelle on demande à Orange le maximum d’investissement et un prix de vente minimum.
- Avec plus de 2 000 salariés qui travaillent dans la cybersécurité dans l’entreprise, Orange est reconnue comme un acteur majeur du secteur. Notre PDG se déclare « optimiste et enthousiaste » sur l’avenir du domaine Entreprises et de ses opportunités de croissance.
- Afrique: un « continent de croissance » où la digitalisation a le plus grand impact. Il faut consolider et développer notre place sur ce continent (CA et profitabilité en croissance). Orange Money y « bancarise » deux fois plus de personnes que les banques traditionnelles.
- Grand public: s’il n’est pas opportun de lancer une nouvelle activité GP, il convient de persévérer et accélérer dans les territoires qu’Orange a choisis, i.e. consolider les contenus, la maison intelligente, les services financiers mobile/banque.
- Se pose enfin la question de la distribution physique, de centres d’appel qui déclinent, des flux qui baissent. Il faut permettre aux personnels d’aller vers de nouveaux métiers, d’ici 2025.
3. Les nouvelles technologies - IA et données
Les nouvelles technologies ont une action sur les modes de fonctionnement du Groupe et de ses personnels. Orange se doit de les accueillir, avec l’idée non de les subir mais d’anticiper l’IA et la DATA et de définir comment les intégrer. C’est-à-dire réfléchir dès maintenant à l’impact sur les fonctionnements, les métiers, les organisations.
Enfin, pour accueillir ces nouvelles technologies, il faut à l’Entreprise les compétences en interne (avec embauches et « re-skilling »)… « Un bon sujet de dialogue social ».
4. L’ambition sociétale et environnementale
Orange doit donner une réponse forte aux enjeux de RSE, réponse affirmée dans le plan 2025, et avec les moyens associés.
Le volet RSE existe déjà dans le Groupe, bien-sûr, mais doit être conforté. La conviction est simple : l’urgence climatique, l’égalité devant le numérique, l’inclusion (13 millions de Français ne savent pas ouvrir un mail…) sont des phénomènes de fond qui doivent trouver une réponse chez Orange
Ainsi, concernant la contribution d’Orange au combat contre le réchauffement climatique, l’objectif global est d’atteindre la neutralité Carbone avant 2050. Les opérateurs les plus avancés se fixent 2030 comme horizon. L’industrie de Telecom peut être l’une des plus avancées dans le monde dans ce domaine.
Intervention de la CFE-CGC
Le contenu de l’intervention de Stéphane Richard n’ayant pas été dévoilé jusqu’au jour du CCUES extraordinaire, la
CFE-CGC Orange a souhaité tirer certaines conclusions d’Essentiels2020 et profiter de son intervention pour rappeler au plus haut niveau de l’Entreprise certaines de ses revendications.
Au terme du plan stratégique Essentiels2020, la CFE-CGC établit un bilan mitigé ; certes Orange a plutôt bien résisté dans un contexte toujours compliqué. Mais cette performance est due avant tout aux choix d’investissements dans le réseau (notre cœur de métier) plutôt qu’à l’exemplarité de notre expérience client ou encore à nos choix de diversification : par exemple la promesse du milliard d’euros réalisés dans la diversification n’a pas été tenue, le cloud GP a été un échec, Homelive de même, Orange Cash abandonné, quid de maison protégée qui vient d’être lancée et dont le processus de vente présente près de 80% de rétractation…
Un bilan donc de croissance « molle », mais de croissance quand même ;
Si l’on analyse ce bilan sous un angle plus qualitatif, (rappelons que l’objectif, très fédérateur, de ce plan était de faire vivre au client une expérience incomparable), depuis 2016 malheureusement, nous n’avons pas progressé au classement de la satisfaction client (source Baromètre stratégique) ; nous étions alors 3e derrière Free et Bouygues, nous le sommes toujours, même si l’écart s’est resserré ; Peut-être les trop nombreuses réorganisations d’Orange France auront-elles empêché l’atteinte de l’objectif.
Bref, l’ambition de faire vivre au client une expérience incomparable avec Orange et même de l’enchantement n’est pas au rendez-vous (on a d’ailleurs au passage, assez vite abandonné le vocabulaire d’enchantement dans les équipes après 2015), même si nous reconnaissons des progrès indéniables mais plus portés par notre stratégie réseau et la promesse de la Fibre, que par l’excellence de nos services associés et de notre relation client en particulier. Rien d’étonnant à cela d’ailleurs quand dans le même temps on se lance dans une politique de sous-traitance guidée par la réduction des coûts.
Concernant le futur plan stratégique 2025, la CFE-CGC Orange espère qu’il sera marqué par une ambition forte de croissance et par l’arrêt de la baisse continue, depuis 20 ans, des effectifs de la maison mère ;
Le fonctionnement opérationnel de l’entreprise
A Orange France, à TGI, les réorganisations se multiplient : Ancrage, DGP, VANILLE, méthode AGILE, Résonance, SKY56, etc., avec des impacts non négligeables sur le fonctionnement opérationnel. Les personnels sont confrontés à des changements d’organigramme, de méthodes de travail, d’environnement de travail, déménagements… tous azimuts.
Le rythme de ces changements s’accélère (tous les 2 ans maintenant), sans tenir compte des capacités non infinies des personnels à les absorber, provoquant un sentiment d’instabilité et de perte de sens. La CFE-CGC Orange insiste pour que ces changements soient mieux coordonnés, pour être absorbés plus facilement.
Surtout, ils doivent être suffisamment espacés dans le temps pour qu’on puisse analyser leurs résultats, en tirer les conclusions et éviter cette impression de fuite en avant qu’une succession erratique de réorganisations a provoquée.
La situation sociale :
Nous entrons dans l’ère post procès de la « crise sociale France-télécom » avec le risque de penser que toute cette période douloureuse de notre entreprise est maintenant soldée et de voir ressurgir des méthodes de management inappropriées.
Nous appelons à la plus grande vigilance. Les résultats de l’enquête triennale SECAFI de 2019 sont un signal d’alerte qui doit être pris en compte ; La CFE-CGC constate une résurgence de comportements managériaux condamnables et souhaiterait à ce titre obtenir les chiffres relatifs à l’évolution des signalements HVT (Harcèlement et Violence au Travail) et aux enquêtes réalisées par le pôle enquêtes internes, ces deux indicateurs semblant être en augmentation.
Par ailleurs, nous constatons que si de gros efforts ont été réalisés pour mieux traiter les personnels d’Orange, il n’en va pas de même du personnel sous-traitant/intérimaire qui est encore trop souvent managé avec violence ; encore récemment un jeune en intérimaire (dont le contrat a été renouvelé plusieurs fois sans réelle perspective d’embauche) nous disait, « par moment, j’ai l’impression de n’être rien pour Orange ». Nous demandons que la plus grande vigilance soit apportée à cette catégorie de personnel qui travaille pour Orange et que des critères « sociaux » soient bien intégrés par nos acheteurs qui sélectionnent les sous-traitants.
Enfin la situation des fonctionnaires, dans cette période où ils vont être de plus en plus minoritaires, préoccupe la CFE-CGC Orange et nous aimerions avoir un retour sur différents points les concernant :
- Tout d’abord sur leur formation ; nous constatons beaucoup plus de refus de CPF pour les fonctionnaires que pour les salariés de droit privé, ce qui constitue une discrimination ;
- ensuite concernant leur rémunération. Quand l’Entreprise va-t-elle enfin se décider à transposer l’évolution des grilles indiciaires déjà en place dans la fonction publique, notamment à la Poste ?
- Concernant les fonctionnaires ayant refusé la reclassification début 90 et restés sur leur grade, ils ont été pénalisés dans leur évolution de carrière, quant à ceux ayant accepté la reclassification et passé en statut de fonction (F, G), ils partiront à la retraite avec leur indice de 4.2. Ceci est ressenti comme une profonde injustice et la CFE-CGC demande qu’il y soit remédié.
Pour finir la CFE-CGC a invité notre PDG à venir échanger en 2020 avec les élus du CGF, qui regroupe essentiellement des élus de filiales (Orange Bank, GDT, B&D, Orange Marine, Globecast, OCS, etc.), élus de filiales françaises donc qui ont bon nombre de sujets de préoccupation sur lesquels échanger, dont la place desdites filiales dans l’avenir du Groupe.