Déménagement forcé à Orange Business : Quand la Rationalisation Déshumanise la Vie des Salariés
Rédigé par Karine RIEUX le . Publié dans SCE.
Début juillet, l’annonce brutale est tombée au CSE Orange Business, en Info Président : « Les salariés du site de Blagnac déménageront sur le campus Tolosa à Balma en 2025. La décision est prise. »
Encore une info tsunami…
Blagnac - Balma : 17kms / 30 à 50 mn en moyenne selon l’horaire de départ pour rejoindre l’autre site. Avec ce déménagement, pour la majorité des salariés concernés, l’aggravation du temps de trajet frisera l’insupportable aux heures de pointe.
Historiquement, les salariés blagnacais sont sur un bassin de vie proche de leur campus actuel. Si la fermeture du site de Blagnac était connue (fin de bail au 31/12/2025) et le campus libéré par les entités présentes (DTSI, Innovation, FS&F, SCE…), les salariés d’Orange Business devaient rejoindre initialement le nouveau campus en construction avec tous leurs collègues. Dans le projet « New Blagnac », les salariés OB étaient bel et bien embarqués et c’était encore le cas fin juin. Dans le dossier présenté lors du CSE de DSTSI, l’établissement porteur du projet de déménagement, les positions de travail pour les salariés d’OB étaient notées.
Alors pourquoi ce revirement de situation début juillet ?
Les arguments de la Direction
Premier argument : RAPPROCHER les acteurs du marché Entreprises
Nos collègues de DSCE sont certes à Tolosa mais nos collègues d’OBS SA sont majoritairement à Blagnac, sur le campus principal ou dans des bâtiments proches.
Alors que le projet d’une filiale OBS était encore récemment à l’ordre du jour de nos CSE respectifs (avant le PDV sur OB), pourquoi envoyer les salariés d’OB à Balma si les salariés OBS SA restent à Blagnac ? Le rapprochement des collègues d’OB avec ceux de DSCE resterait partiel.
L’anguille est sous la roche !
Début juillet, lors de son CSE, OBS SA a eu la même Info Président avec l'annonce du déménagement des salariés sur le campus de Balma. 223 collègues travaillent à OBS SA et 30 nouvelles recrues sont attendues courant 2024 à Blagnac. Au total, près de 500 salariés devraient se rajouter à ceux déjà présents sur le campus Tolosa en 2025 ! Les 230 d’OB et les 253 salariés d’OBS SA…
Second argument : DENSIFIER
Aujourd’hui, le campus Tolosa accueille 1200 salariés. Avec l’arrivée des 337 collègues de l’UPR fin 2023, le campus hébergera 1537 salariés. Avec les effectifs d’OB et OBS SA, 2020 collaborateurs travailleront sur le campus en 2025.
Comme vous, ces déménagements à la chaine pour densifier le campus Tolosa nous interrogent. Combien de salariés ce campus peut-il héberger ? Et densifier, jusqu’à quel point ?
Les élus CFE-CGC d’OBS SA nous ont donné un début de réponse. Depuis un an, ils dénoncent une situation inacceptable sur le plan Sécurité et Conditions de Travail à Tolosa.
27 salariés OBS SA sont parqués dans une salle de réunion dont la capacité maximale est de 12 personnes. Une capacité largement dépassée avec une promiscuité dont pâtissent nos collègues autour de tables de réunion inadaptées. De plus, nos collègues d’OBS SA sont régulièrement expulsés de cette salle réservée à son usage premier : des réunions et se retrouvent obligés de travailler dans les espaces de vie ou les couloirs ! Cette situation perdure depuis un an.
Comment le campus Tolosa pourra-t-il accueillir plus de 2000 salariés en 2025, si aujourd’hui il est impossible de disposer de bureaux pour les 27 salariés d’OBS SA afin de travailler dans de bonnes conditions? Le discours de la DGI est « Nous ne sommes pas en capacité de vous fournir d’autres espaces de travail » …
«Faut pas rêver !»
Tout comme pour nos collègues d’OBS SA, le déménagement vers le campus Tolosa à Balma ne satisfait pas la majorité d’entre vous.
Après le projet de filialisation "en sommeil", le projet de transformation en cours avec la suppression de 643 postes, celui de la Rupture Conventionnelle Collective RCC ou du Plan de Départs Volontaires PDV, le déménagement vers Balma est le dernier coup assené par la Direction.
Le maître-mot « non-dit » qui découle du précédent : RATIONALISER !
Contrairement à certaines entreprises comme SAFRAN, qui s'efforcent de déterminer la zone géographique idéale qui conviendrait à leurs employés avant de mettre en place de nouveaux projets sur Toulouse, Orange elle, néglige cet aspect et ne semble pas se préoccuper de la QVCT (Qualité de Vie et Conditions de Travail) de ses salariés.
Elle va jusqu’à ignorer les résultats de l’enquête sur le stress commandée au cabinet STIMULUS dans le cadre de sa réorganisation qui révèle que le temps de transport est la quatrième source majeure d'inconfort pour 48% des répondants, après l'organisation face aux imprévus (50%), la quantité de travail (52%) et les ressources humaines disponibles (56%).
Pour la Direction d'Orange, l'impact négatif de l'augmentation du temps de trajet vers Tolosa sur la vie quotidienne ne semble pas être un sujet, tout comme l'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, ni le stress qui serait exacerbé par d'autres facteurs tels que l'autonomie dans la gestion du planning et la capacité à se déconnecter. A ce déménagement s’ajoutera des conséquences financières et perturbera l'organisation personnelle et familiale des personnels éloignés de Tolosa.
Un choix qui s’avère délétère, risquant d'aggraver les problèmes de santé mentale au travail et pourrait également être perçu comme une stratégie cynique visant à réduire les coûts, en particulier, après un plan de départ volontaire et une éventuelle filialisation à venir.
L’herbe semble plus verte ailleurs
Quand la Qualité de Vie au Travail se détériore, les salariés « regardent chez le voisin ». Cela a été le cas pour d’autres projets de déménagement, notamment d’OBS SA du centre-ville vers la périphérie à Bordeaux ou à Toulouse. Ce sera encore le cas pour les salariés d’OBS SA lors du déménagement vers Balma. Dans des secteurs d’activités où la ressource humaine est rare, le rapport de force est à l’avantage des experts.
Pour OB, après la transformation, les suppressions de poste, le PDV, les salariés envisageront-ils d’aller voir ailleurs si l’herbe est plus verte ? C’est déjà une réalité avec de nombreux départs depuis l’annonce de la transformation. Pour preuve, les premiers retours sont sans appel : « avec cet annonce de déménagement, ça fait beaucoup ! », « j’ai un an pour trouver un autre poste… », « j’envisage de suivre mes collègues partis »…
Encore une fois, notre Direction ne réalise aucune prévention primaire. Dans de nombreuses résolutions, vos élus de CSE ont alerté à maintes reprises sur cette situation. Alors que d’autres entreprises plus bienveillantes envers leurs salariés et plus respectueuses de l’environnement font des choix éclairés, notre Direction persiste dans une politique opportuniste à court terme de réduction de coûts avec une baisse vertigineuse de sa masse salariale.
Sortie de route ?
Et que penser de la RSE d’une entreprise qui dans ses choix, ne tient pas compte du bien-être de ses salariés? Qui, malgré des annonces médiatiques « Carbone zéro en 2040 », aggravent le temps de trajet pour les déplacements domicile/travail de ses collaborateurs ?
Quelle est la logique de rapprocher les acteurs du marché entreprise sur un même campus toulousain (ou parisien, avec un projet similaire de concentrer les effectifs parisiens sur le site de Stadium à St Denis), alors que le projet de transformation en cours repose sur l’offshoring et prévoit un transfert massif des activités vers les Managers Services Client de l’Océan Indien ? Dans l'Orange Business de demain, les salariés vont accroitre leurs échanges avec les collègues mauriciens, malgaches, marocains, indiens…
Les cours de yoga, de cuisine, les conférences sur la colorimétrie pour se mettre en joie ou la présence d’un babyfoot sur site ne contrebalanceront jamais les conséquences négatives de choix qui impacteront et dégraderont LA VIE des salariés, au bureau comme dans leur vie privée !